Bien
avant la cascade de désapprobations soulevée par son récent passage dans son
pays natal, dans le cadre du problématique festival littéraire Étonnants
Voyageurs, le
« Français » et Congolais Alain Mabanckou s'est fait rudement
tancer par le doyen des écrivains béninois, Olympe Bhêly-Quenum, qui n’a guère
apprécié son séjour au Bénin pour le même projet. Il le fait savoir dans
ce texte très révélateur publié par le site béninois
http://lautrefraternite.com
À QUAND UN INSTITUT PANAFRICAIN DE CRÉATION LITTÉRAIRE ? [1]
Le Bénin n’est
pas le Quartier latin d’Afrique : parlant du Dahomey qu’il
visita en 1947, Emmanuel Mounier qualifia de « Quartier Latin de
l’A.O.F. » cette colonie de l’Afrique occidentale française ; la nuance étant
importante, je l’ai déjà soulignée en citant quelques-unes des personnalités
que le philosophe personnaliste avait rencontrées ; ce Dahomey-là devenu le
Bénin aura-t-il besoin d’un Alain Mabanckou pour savoir ce qu’il faudra
faire en matière de création littéraire, culturelle, renouvellement, etc ?
Qu’il prospecte en vue d’un colloque ou salon des Etonnants Voyageurs
à Brazzaville est légitime : prix Renaudot obtenu au forceps, écrivain
ubiquitaire, il est normal – marketing personnel aussi oblige- qu’il
soit utile à quelque chose dans son pays qu’il n’osera jamais affronter
politiquement.
La régression
tous azimuts de l’ex-« Quartier Latin de l’A.O.F. » est telle qu’en matière
de création littéraire, le Béninois Florent Couao-Zotti s’estime si
important in situ, si soucieux de renouvellement comme l’autre l’a été de «
Changement », qu’il a jugé primordial de pilorier « les thématiques relativement
éculées de Jean Pliya et d’Olympe Bhêly-Quenum. »
Quant à son
confrère Alain Mabanckou, il appert que le Bénin n’aura jamais besoin
d’un homme de son tissu pour pallier sa carence en création littéraire bien
que, hélas ! Les potentialités, énormes, soient systématiquement annihilées par
le régime de l’inculture, de la dictature aussi contre laquelle
s’insurge enfin l’Ordre des avocats que je soutiens ; il faut les aider : la
France sous François Hollande ne connaîtra pas, je l’espère, la détestation
du sarkozysme, mais c’est l’insurrection des artistes, des écrivains
et des intellectuels qui sortira le pays de l’impasse et du marasme actuel.
Le fait que
Monsieur Alain Mabanckou ait été l’hôte de l’Ifb (NDLR: Institut français du Bénin) après la
diffusion de : « LE MYSTÈRE DES MESSES QUOTIDIENNES DEMANDÉES PAR SASSOU
NGUESSO A UNE ÉGLISE BÉNINOISE (GODOMEY) » a généré des suspicions;
que Florent Couao-Zotti l’eût cornaqué a fait souffler un vent de
magouilles dans le prélart de cette invitation ; que le programme du séjour
eût été, entre autres, souché sur l’animation de « deux conférences
respectivement à l’Institut Tévoédjrè de Porto-Novo et à l’Ifb » dénote sans
ambages le fonctionnement des courroies de FrançAfrique : bien
qu’enfantin, le piège du séjour de Monsieur Mabanckou est
à multi détentes ; j’exhorte donc les élèves, les étudiants, les
enseignants, les intellectuels aussi à avoir les yeux grands ouverts.
Quand je
travaille à mes livres dont plus d’un tient la route depuis plus d’un
demi-siècle, je ne songe jamais à piétiner mes prédécesseurs, qu’ils soient
africains ou d’un autre continent ; je dis donc : eu égard à l’estime que
j’avais pour Florent Couao-Zotti, je suis triste pour son avenir littéraire ;
Socrate réussissait la maïeutique ; quel avenir pour la création littéraire au
Bénin, si le récipiendaire d’un prix littéraire obtenu au forceps comme
pour un accouchement à problèmes ? Ni Florent Couao-Zotti ni Monsieur
Alain Mabanckou venu l’encenser au Bénin ne détrôneront Olympe Bhêly-Quenum. Je
pourrais traiter leur démarche par le mépris, voire, par l’indifférence, mais
abikú, je préfère sortir du Bois et déminer le terrain.
Qui est Monsieur
Alain Manbanckou ? Aura-t-on
constaté qu’il était allé au Bénin à l’époque où circulait le document faisant
état de la messe d’Action de grâces dont la somme provenait du
Congo Brazzaville ? Il n’y a pas de connexion probable entre les deux faits,
mais l’argent, somme énorme, provenait du Congo-Brazzaville ; Monsieur Alain
Mabanckou y naquit en 1966[2] ; on s’est hâté de m’écrire : «…
un des acteurs, le manipulateur des fonds est de votre famille » ; je ne renie
jamais les miens, mais je ne suis pas comptable de leurs actes, bons, ou
mauvais et préjudiciables. Dans son élucubration dont on peut lire (fj)
l’essentiel à mon sujet, Monsieur Mabanckou déclare :
« Kourouma
est le deuxième auteur africain à recevoir le Renaudot). Qui dit mieux
??? C’était suffisant pour que le vieux sage ivoirien, l’indéboulonnable
Kourouma, soit la cible des tirs groupés de quelques écrivains envieux qui
guettent à chaque aurore le jour de leur propre couronnement… qui ne viendra
jamais ou, dans le meilleur des cas, surviendra à titre posthume ! Et encore… »
Qu’il m’ait
accusé ou simplement soupçonné de jalousie à propos de mon interview consacrée
à Ahmadou Kourouma m’a fait rire et rappeler deux anecdotes
d’un de ses amis :
1°A Alger, lors d’un colloque
littéraire, la pulsion de paraître, de se mettre en vedette tel
le chaton de l’anneau de Gygès avait incité Monsieur Alain Mabanckou à déclarer
que Wole Soyinka était décédé.
2° Cherchant à
bien se coller à Sarkozy, l’écrivain congolais lui dit avoir fréquenté la
même université que lui ; l’ex-chef d’Etat a vivement pris ses distances
en précisant où il avait fait ses études de droit.
Ces
comportements révèlent sa nature et je dis : des regrettés Félix
Tchicaya U’ Tamsi, Sony Labou Tansi[3], Jean-Baptiste Tati
Loutard, à Aimée Gnanli et Henry Lopès, les écrivains
congolais que j’ai connus et que je relis volontiers étaient et sont d’une
texture autre que celle de Monsieur Alain Mabanckou ; ni lui ni
Monsieur Florent Couao-Zotti qu’il est allé épauler au Bénin où il
cherchait à étoffer son public de lecteurs n’ont encore eu et n’auront
jamais le courage du romancier-écrivain politique que je suis
: je décris mon pays, ceux des régions africaines où il m’arrive de séjourner,
constate les maux dont ils souffrent, leur pauvreté, leur régression tant
culturelle que morale ; à visage découvert, l’écrivain politique montre
du doigt en les dénonçant nommément les acteurs politiques qui réduisent
nos pays à un tel stage. De Promenade dans la forêt[4] à C’était à
Tigony, roman dont 45 exemplaires envoyés à la presse de l’Hexagone
ont été étouffés, nul ne peut me taxer de plagiat.
Sur le plan
politique, j’aimerais bien connaître les réactions écrites de
Messieurs Couao-Zotti et Mabanckou quand, président de la République
française, le sieur Nicolas Sarkozy a eu piétiné l’Afrique au
sein de l’université Cheikh Anta Diop; exemplaire était la virulence des filles
de Kourouma parue dans Libération ; mes ripostes contre Sarkozy et son
scribe Henri Guaino sont encore en ligne à : www.obhelyquenum.com (( cf.
rubrique Politique) ; par deux fois Olympe Bhêly-Quenum est cité dans L’Afrique
répond à Sarkozy[5]
Voilà qui et
quel écrivain africain je suis : le contraire des salamandres des Instituts
français, anglais, américains, allemand, etc. dont j’apprécie la présence,
l’utilité ainsi que l’importance dans nos pays, mais pas au point d’applaudir
les lobbies, ni les Africains dénaturés, serviles qui sapent
les fondements socio anthropologiques et socioculturels des pays
africains.
Olympe
BHÊLY-QUENUM
[1] L’idée et le
projet en existent depuis 1998 ; j’en avais longuement discuté avec le Cardinal
Gantin.
[2] Année où
j’ai été fait lauréat du Grand prix d’Afrique pour Le Chant du Lac.
[3] Il avait
reçu le prix Ibsen en 1988 et je lui ai consacré une partie de mon intervention
à Oslo.
[4] Ma première
nouvelle écrite en 1949 après ma rencontre avec André Breton.
[5] Edits
Philippe Rey, Paris.