samedi 16 janvier 2021

SORTIR DE LA PRISON ÉPIDERMIQUE

 

Ceci est ma résolution de l'an 2021: sortir de la prison « raciale » pour accomplir ma destinée qui est d'ouvrir les yeux du monde sur certaines réalités, conformément aux oracles de certaines sorcières charmantes et multicolores qui ont croisé ma route quand j'étais plus ou moins dans la fleur de l'âge. Ça fait très longtemps déjà que j'écris sur les questions raciales, je veux dire les questions épidermiques, la valorisation de la noirceur épidermique, la réhabilitation de l'homme noir, les héros noirs et tutti quanti. Pour cela, j'avais été fiché dans les annales de la France coloniale, désireuse de me couper l'herbe sous les pieds. Les appels anonymes et les filatures même sur les terrains de foot n'ont pas manqué. Pas même la tentative de mettre un terme à mon parcours académique. Pas même le vol de ma sacoche, contenant mon premier manuscrit écrit à la main, dans le métro de Paris en plein jour, le 1er mai 1995. Une plainte contre X a été déposée à l'occasion…

Aujourd'hui, je suis fatigué de la question raciale, car la « race » n'a jamais été une question de couleur de la peau chez moi, ni même une question de culture ou de religion, car les gens d'un même pays, d'une même culture et souvent d'une même religion, parlant la même langue s'entredéchirent pour des questions raciales, sur la base de mythes et de légendes, échafaudés par les « gardiens de la mémoire ». Je n'ai pas de mots pour qualifier pareille insanité. Par ailleurs, ça fait bien des années que je vis avec la douleur d'avoir découvert que mon histoire, aussi bien récente que lointaine, est loin, très loin d'être le folklore traditionnel auquel on a voulu la réduire. J'ai découvert que mes ancêtres ne sont pas tels que je voulais bien les voir. J'ai découvert que certains rituels auxquels des passéistes s'accrochent ne sont pas de mon pays, qu'ils y ont été importés. Je ne saurais m'étendre sur toutes les découvertes désagréables qui sont le lot de tout chercheur, forcément appelé à être désabusé dans ses croyances initiales. Une réalité qu'un chercheur sénégalais, à qui j'avais transmis les premiers résultats de mon enquête historique en 2004, avait résumée en ces propos: « À l'époque, j'avais fait de semblables remarques à Bamako. Ce fut un coup de grisou. Les Africains devraient s'attendre à de nombreuses autres douloureuses révisions historiques.»

APPEL AUX GENS DE MA « RACE »

Oui, vous avez bien lu « race », mais je ne crois pas que vous avez bien compris. Quand je parle de gens de ma « race », ce n'est pas la «race» à laquelle vous pensez. Je ne parle ni de gens de la même couleur de peau, ni de la même culture, ni du même pays que moi. Je parle de gens qui ont la même vision, les même caractéristiques, le même amour pour la vérité, la justice, l'équité et toutes autres valeurs pour lesquelles je me bats dans ce monde. En termes plus terre à terre, je fais appel aux BLANCS, aux BASANÉS, aux JAUNES, aux NOIRS, aux ROUGES de mon espèce, amoureux de littérature et de culture en général pour un grand projet de l'esprit. Je fais appel à la fois à ceux qui sont intéressés par l'édition et par la production cinématographique et musicale. J'ai de la matière consistante pour eux.

Car, pendant que d'autres s'évertuaient à se faire du nom et de l'argent, en pillant, en contrefaisant ou en mimant les travaux des autres, j'ai passé mon temps à faire des recherches sur des terrains inexplorés, à écrire et à composer.
Aujourd'hui, j'ai besoin de gens valables autour de moi pour donner corps aux fruits de mon labeur. J'ai besoin de la crème de tous les peuples pour redonner du souffle au monde mourant. À défaut de réinventer la roue de la littérature, je lui ai enlevé la rouille qui l'entrave, et l'ai enduite de l'onction de l'huile de la résurrection.

J'en ai marre de la promiscuité de ces démagogues noirs — tous ces Nègres fratricides, racistes, baveux et complaisants avec eux-mêmes — et de leurs discours mensongers et infructueux. Je voudrais en dire plus, mais je n'en ai ni l'envie ni le souffle.

MF Kantéka