vendredi 28 août 2020

MALI: LA RAISON D'ÉTAT CONTRE L'ÉTAT DE DROIT


Nous avons récemment entendu des débats dans lesquels on disait que, malgré le déroulement paisible de l'action concertée pour faire démissionner le président malien IBK, elle n'en demeure pas moins un coup d'État (qu'on estime condamnable). Pour cela, les débatteurs, dont des orateurs hors-pairs et des spécialistes du retournement de veste, avançaient des arguments juridiques, invoquant la Constitution et autres arguments techniques. Comme s'ils se voulaient plus légalistes que tous les autres juristes du Mali qui ont vu dans cette opération une façon de préserver l'intérêt supérieur du Mali, en le débarrassant d'un homme qui mettait sa survie en cause.
C'est pourquoi nous avons pensé à leur rappeler une règle qui transcende la Constitution. C'est la raison d'État! Et voici une des définitions qu'on donne de ce concept:
« La raison d'État est un principe d'action politique selon lequel l'intérêt ou la sauvegarde de l'État prime toutes les autres considérations, notamment les normes de l'organisation sociale, y compris celles de la morale et du droit. Ainsi, la raison d'État est invoquée par les gouvernants pour justifier une action illégale ou inconstitutionnelle au nom de l'intérêt public. Elle s'oppose aux notions de droit et d'État de droit.» (source: La Toupie)
Sur la base de la même définition, on peut aussi concevoir que cette raison d'État soit invoquée par une partie de la population, voire des militaires, pour écarter du pouvoir un danger potentiel pour le pays. Dans tous les cas, la Constitution ne saurait être une fin en soi (elle est même très souvent violée par ceux qui s'en servent pour accéder au pouvoir et s'y maintenir). La fin en soi est la survie de l'État.
On peut se servir des arguments de droit pour dire ce qu'on veut bien dire. N'empêche que la France elle-même, dont on singe les pratiques politiques, a donné sa bénédiction à ce changement de régime. Le ministre français Jean Yves Le Drian affirmait sur RTL que le président Macron a tenté en vain d'avertir IBK sur les dangers des pratiques consistant à truquer les élections. Et qu'en définitive, même si « il y a eu un coup d'État, il y a eu aussi la démission d'IBK.» Et que la France se met aux côtés du peuple malien.
Donc, insister là-dessus, comme le font les débatteurs-avocats du diable, c'est vouloir être plus royalistes que le roi. Y compris IBK lui-même qui affirme ne jamais vouloir retourner au pouvoir, même pour une seconde. Pas même pour tout l'or du monde! Alors, c'est quoi leur problème?

MF Kantéka